Fusions et Acquisitions : Pourquoi L'Audit Culturel est la Clé du Succès
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Résumé
L'article met en lumière l'importance de l'audit culturel dans les fusions et acquisitions (M&A), souvent négligé malgré son impact crucial sur le succès des transactions. Il explique comment l'évaluation des cultures d'entreprise depuis les années 1980 a évolué, devenant un facteur déterminant pour éviter les échecs coûteux, comme illustré par la fusion Wells Fargo-Crocker National Bank. Des exemples de succès, tels que l'acquisition de Pixar par Disney, démontrent l'efficacité d'une intégration culturelle bien gérée. En conclusion, l'article recommande des audits précoces et un suivi régulier pour garantir l'alignement culturel et le succès à long terme des fusions.
Comment expliquer que jusqu'à 90% des opérations de M&A se soldent par un échec ? Fusions, acquisitions, opérations de carve-out, divestitures, ou encore création de consortiums... Que l’on soit banquier d'affaires, spécialiste en M&A ou partner dans un fonds d'investissement, ces termes nous ramènent souvent à des notions financières. Or, il existe un aspect fréquemment sous-estimé et qui pourtant fait ou défait le succès d’une transaction : l’audit culturel.
Aujourd'hui, de nombreuses entreprises, des PMEs aux géants du numérique comme Amazon ou Google, négligent encore cet aspect dans certaines de leurs transactions et font ainsi face aux défis de l'intégration post-acquisition, là où d’autres, à l'instar de Disney ou Mars Confectionary, excellent dans la maîtrise de ces enjeux. Ces différences mettent en lumière l’intérêt stratégique de conduire un audit culturel, ainsi que l’approche méthodique qu’il nécessite pour le transformer en avantage concurrentiel.
Réaliser un audit culturel en phase de pré-intégration est d’une importance capitale
Des Années 1980 à aujourd'hui : la due diligence culturelle est encore sur la route de la maturité
Cette pratique ne date pourtant pas d’hier. Dès le début des années 1980, face à l'augmentation des opérations de M&A, la due diligence culturelle a commencé à gagner en attention pour son importance dans le succès ou l'échec des transactions. Cette mise en lumière fut notamment acquise grâce à de retentissants échecs, tels que la fusion de Wells Fargo avec Crocker National Bank en 1986, menant à de colossales pertes financières pour la banque du grand Ouest Américain. Cependant, cette prise de conscience fut graduelle, et les techniques d’évaluation sont longtemps restées incomplètes et/ou uniquement basées sur des techniques d’observation, pas toujours efficaces, entretenant ainsi l’ambiguïté autour des bénéfices attendus.
Aussi, le concept même de culture d’entreprise, souvent perçu comme intangible, regroupe à la fois les valeurs, les croyances, les pratiques et les comportements qui caractérisent une organisation. De ce fait et bien que sa valeur soit de plus en plus reconnue, les méthodologies pour évaluer efficacement la compatibilité culturelle de deux entreprises restent en développement. La nature changeante des marchés et des environnements de travail, notamment avec l'accélération de la mondialisation et l'adoption massive du télétravail, ajoute des couches de complexité supplémentaires nécessitant des approches adaptatives pour rester pertinentes et efficaces.
Les clashs culturels coûtent cher aux entreprises
Aussi diverses que soient les pratiques d’évaluation, elles visent avant tout à dresser un état des lieux des cultures en présence et à se prémunir des clashs culturels. Lorsque deux entreprises aux cultures divergentes tentent de fusionner sans une compréhension et surtout une intégration adéquate de ces différences, le résultat peut être chaotique. Citons notamment des pertes financières substantielles, un départ parfois massif des talents vers la concurrence et une détérioration des relations avec les différentes parties prenantes (clients, fournisseurs, etc.).
Des cas notables sont souvent cités en exemple dans les programmes de MBA, tels que la fusion de Daimler-Benz avec Chrysler en 1998. La vague de départs de cadres clés de Chrysler vers des concurrents comme GM et Ford a non seulement contribué au transfert de connaissances précieuses mais a aussi sapé le moral interne des équipes, contribuant à l'instabilité et à une perception négative du grand publique, des médias, et donc des investisseurs. Cette hémorragie de talents, combinée à des défis plus larges du marché automobile, a gravement nui à la valeur pour les actionnaires et a finalement conduit à l'échec coûteux de la fusion avec Daimler résultant en une perte massive de plus de 20 milliards de dollars.
Entre culture et stratégie
A contrario, certaines entreprises ont appris à appréhender avec brio les avantages d’une intégration culturelle réussie, citons l’exemple de l'acquisition de Pixar par Disney en 2006, pour 7,4 milliards de dollars, qui s'est révélée être une stratégie fructueuse malgré les différences culturelles et structurelles initiales. Cette fusion a réussi à maintenir l'identité corporative et la reconnaissance de la marque Pixar, en conservant ses pratiques et habitudes.
La due diligence culturelle joue un rôle clé dès le début du processus de transaction en permettant d'identifier d’éventuels signaux d'alerte et, surtout, en aidant à préparer un plan d'action pour l'intégration. Ce plan vise à faciliter l'émergence de synergies opérationnelles. Bien qu'elle ne soit pas un facteur déterminant pour la conclusion d'une transaction, cette approche offre une perspective essentielle qui va au-delà des analyses financières et stratégiques, en s'attaquant directement au cœur même de ce qui fait ou défait une fusion réussie. En intégrant l'évaluation du capital humain dès les premières étapes du processus de M&A, les entreprises sont alors en mesure d'éviter les pièges habituels qui conduisent à l'échec des transactions et, in fine, d'optimiser la création de valeur post acquisition.
Méthodologie pour réussir un audit culturel
L’audit culturel est un exercice compliqué par essence
Réaliser un audit culturel efficace exige d'abord une approche méthodique et stratégique. Comme mentionné précédemment, il est crucial d'effectuer cet exercice le plus tôt possible dans le processus transactionnel. Cela permet de détecter les incompatibilités culturelles susceptibles de compromettre l'intégration post-fusion. Cependant, cette approche est rarement mise en pratique. Premièrement car elle nécessite du temps et un engagement considérable de la part des différentes parties prenantes, ce qui génère légitimement la crainte de retards. Or, des retards à ce stade peuvent exposer l'accord à des risques de marché susceptibles de conduire à son échec. De plus, l'accès à des informations pertinentes est souvent restreint en raison de la haute confidentialité des accords. Enfin, les informations disponibles restent fréquemment superficielles, se basant sur des données publiques, des observations et des suppositions, sans une réelle implication du personnel de l'entreprise ciblée.
Deux étapes cruciales : définir les objectifs de l’audit en amont et collecter les informations utiles
Il existe cependant des moyens d'atténuer ou même de contourner ces limites. La première étape consiste à définir les objectifs de l'audit culturel, ce qui permet de cibler précisément les aspects de la culture organisationnelle à examiner, tels que les valeurs partagées, les pratiques de travail, et l'attitude envers le changement et l'innovation. Ces critères varient notamment selon l’objectif de la transaction, l’entité qui la finance et le secteur d’activité concerné. Les activités menées à cette étape se concentrent autour de l’identification des potentielles synergies et des conflits entre les cultures des deux entités. Pour ce faire, il est recommandé de constituer une équipe d'audit composée de membres compétents en ressources humaines, en gestion, et idéalement en conseil culturel, pour garantir une évaluation complète et impartiale.
La collecte d'informations constitue la seconde étape. Elle implique l'utilisation de diverses sources, des données publiques disponibles sur des plateformes telles que LinkedIn ou Glassdoor, aux rapports annuels, en passant par les enquêtes de satisfaction interne et les documents RH, le plus souvent partiellement présents dans la data room créée pour alimenter les discussions transactionnelles. Cette phase doit aussi inclure l'élaboration de questionnaires détaillés, ainsi que la réalisation d'interviews semi-structurées avec les employés et les dirigeants. Ces méthodes mixtes fournissent ainsi une base riche pour l'interprétation des données. À l'aide d'outils analytiques et de modèles théoriques, souvent propriétaires, il est alors possible de déceler les tendances, les divergences, et les risques de conflits culturels. Un rapport de risque culturel est alors rédigé, soulignant les différences critiques et proposant des recommandations pour l'alignement et l’intégration culturelle.
Sur la base des risques identifiés, il est alors nécessaire de développer des stratégies d'intégration culturelle. Cette planification doit inclure l'organisation de sessions de formation, d’ateliers sur les valeurs d'entreprise partagées, et des programmes d'échange pour faciliter la compréhension mutuelle et l'assimilation culturelle. La communication joue également un rôle clé dans cette étape, non seulement pour diffuser les résultats de l'audit, mais aussi pour assurer une transition fluide et transparente pour tous les employés concernés.
Enfin, l'audit culturel ne s'achève pas avec la clôture de la transaction ; un suivi régulier est crucial pour une intégration réussie. Ce suivi implique la réalisation d'enquêtes périodiques, l'écoute active des feedbacks des employés, et l'adaptation des stratégies d'intégration selon les besoins identifiés. Ce processus continu est vital pour maintenir l'alignement culturel et pour adresser tout problème qui pourrait émerger, garantissant ainsi que l'intégration culturelle contribue positivement à la réussite globale de la fusion.
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